Nuit cinquième : Sur les pentes du Stelivo. Franzenshohe, Berghotel. 2188m.
Km 724. 14
Juin 2012. Haute-Adige. Italia.
Les
chiffres du jour :
Km : 158km
Temps : 9h25
Cols : 6
Dénivellation
positive : 4400m
Particularités : dernier passage
Suisse avec le Val Bernina, puis, après 3 cols italien, un dernier passage dans
le val Müstair avant de quitter définitivement la Suisse. 3 langues au
programme du jour : l’allemand (Haute-Adige I), le romanche (Val Bernina
et Müstair CH) et l’italien (Trentin I). Plus haute route d’Italie et de Suisse
au menu…
Le gel ce
matin au réveil dans la Bernina. L ’Eau
de ma gourde a complètement gelé ! Bonnet,
gants et équipement d'« hiver » ressortis pour l’occasions, c’est
donc dans un atmosphère glacial que commence cette journée.
Magnifique
vallée menant au col de la
Bernina à 2328m d’altitude, dont la particularité est d’être
le plus haut col d’Europe ouvert toute l’année, le Val Bernina permet une mise
en jambe matinale parfaite. Depuis le camping, c’est 11km longiligne menant au
col, jamais raide. De chaque coté de la route de nombreuses montagnes enneigées
permettent de pédaler tranquillement tout en admirant ces paysages grandioses,
notamment le Piz Bernina dont le sommet dépasse les 4000m. De l’autre côté du
col, le Val di Poschiavo rejoint l’Italie et la ville de Tirano. Grâce à la
très belle ligne ferroviaire « Bernina-Express » qui passe également
par le col, il est d’ailleurs possible de rejoindre cette ville en train depuis
l’Engadine, hiver comme été.
Cependant ma route ne va pas suivre la ligne
ferroviaire jusqu’à Tirano: après 4km de descente en direction de l’Italie, je
repars sur le Nord pour grimper la « Forcola di Livigno », col frontière
avec l’Italie et deuxième ascencion de la journée, culminant à 2315m. Avant de
redescendre sur la station de Livigno dans la vallée du même nom, qui
contentera de nombreux sportifs en quête d’altitude et de fraîcheur. Si elle ne
m’aura nécessité que 4km, l’ascencion de Forcola di Livigno demeure néamoins
comme une très belle route. Entourée de montagnes aux versants plus sec et
rocailleux que ceux de la
Bernina , elle rappelle un peu les Alpes du Sud (France) voire
certaines régions du Valais. La descente sur Livigno, plus longue (15km),
rappelle également ces paysages parfois presque « lunaire », avant
d’arriver dans les forêts plus typiques des Alpes.
En grimpant Forcola di Livigno
|
Ici la
folle magie des Alpes pèse de tout son poids : en effet, les vallées, bien
que très proche les unes des autres, permettent parfois de fortes variations de
climats, de végétations et culturels. Apportant à ce voyage une variété
incroyable. La région
reste enneigée et fraîche mais aujourd’hui le soleil est bien présent. C’est
donc dans un rythme soutenu que je traverse Livigno avant de grimper les cols
d’Eira (2208m) et de Foscagcno (2291m). Sans jamais redescendre en-dessous de
1800m avant la descente du Passo
Foscagno, cette matinée restera spéciale grâce à ces nombreux km pédalés
en altitude, sans redescendre en plaine. La descente du Passo Foscagno mène, à
travers de nombreuses forêts de pins, jusqu’à la très connue station de Bormio.
Bref retour à la civilisation avant l’énorme après-midi qui m’attends…En effet
au programme, tournant autour du mythique Stelvio, les plus hautes routes de
Suisse et d’Italie. Rien que ça...
Le "Canyon"
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L’Umbrailpass,
2503m, sera la première ascencion de l’après-midi. Bien qu’étant la plus haute
route de Suisse il sera grimpé par le versant italien, sur 18km d’ascencion
(1200m de dénivellation positive) très sauvage sans traverser le moindre
village. Ici la végétation ne ressemble plus vraiment à ce que j’ai connu
jusqu’alors. La première partie de l’ascencion se situe dans un énorme canyon
ou les pins constitue la principale végétation, remplaçant les sapins habituelles aux Alpes du Nord. La route, serpentant à travers les
rochers, est numérotée à chaque virage, dans un ordre décroissant. Par moment
celle-ci « entre » dans la montagne et ressort à quelques centimètres
de l’impressionnant ravin qui la côtoie, surprenant bons nombres d'automobilistes venus de plates contrées et non-habitué à pareils spectacles. La région est beaucoup plus aride que
les cols précédents, pourtant distants de quelques km à peine et de nombreux
cyclistes et motards la gravissent, que ce soient pour « l’exploit
sportif » ou plus simplement pour la magie qu’elle apporte. Devancés de 18 jours à peine par le Tour d’Italie lors de l’étape reine du Giro 2012, de nombreux noms de cyclistes décorent la route, ce qui renforce encore un peu la sensation de grandeur et "d'exploit" au cycliste qui gravit le Stelvio en ce début d’été.
Le Stelvio vu depuis l'Umbrail
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Après une multitude de virages en épingles, la route « s’applatit » un peu pour les prochains km, « sortant » de ce canyon pour arriver sur un haut plateau ou la verdure, malgré l’altitude (2200m), arrive enfin à ce faire un peu de place. Beaucoup plus longiligne,la route mène ainsi jusqu’à la frontière italo-suisse, à 3km du col du Stelvio,où se situe la bifurcation pour l’Umbrail. La route principale reste en Italie et mène, durant 3km à très pentu et en virages, jusqu’au col du Stelvio. Mais pour pouvoir grimper le Stelvio par l’autre versant, le côté mythique, la face nord, je vais devoir me contenter de l’Umbrail et faire la boucle par la Suisse et quelques km dans le Val Müstair avant de revenir jusqu’au village italien de « Prad allo Stelvio ». Bien qu’étant en Italie, la langue principale de cette région, la Haute-Adige (ou Süd-Tirol) est l’allemand. Nouveau changement culturel. Mais il est déjà 17h00 quand je m’attaque enfin au 6ème et dernier col de la journée, le plus dure de ce voyage, le Passo dello Stelvio, face Nord…
24km pour
grimper 1800m, un seul replat de 500 mètres à peine, des passages à 14%, 48
virages en épingles numérotés dans l’ordre décroissant, des paysages incroyables, le Stelvio donne le
vertige. Et si vous y ajoutez les 5 cols précedemment grimpés dans la journée, il devient monstrueux...
L'Ortles |
Sur la gauche règne en maître le massif de l’Ortles. Dominant la vallée avec ces neiges étincelantes il donne à l’ascencion quelque chose d’unique. Les cris stridents des nombreuses marmottes, qui ne semblent en aucun cas effrayé par la circulation, se mêlent au crissement de freins des voitures descendant ces virages impressionnant. Si chaque col est unique, le Stelvio l’est plus encore.
Et après
près de 150km d’étape et 4400m d’ascencion chaque mètre compte, mais chaque
mètre est plus dure que le précédent. Le soleil, caché par ce monstrueux mur,
est couché pour les 10 derniers km. A plus de 2000m d’altitude, la température
chute à 3°C
à peine. Et c'est à 19h45 que je rejoins enfin le Passo dello Stelvio…
Pour son altitude, sa difficulté, sa route vertigineuse, sa
nature, pour sa beauté et tout le reste, le Stelvio donne des frissons… Et ce
soir je dors sur ces pentes, en revenant sur mes traces sur quelques km pour
mieux le regrimper au petit matin.
Avec 87km à plus de 1800m d’altitude, 6 cols à
plus de 2000m dont le plus haut d’Italie (Passo dello Stelvio 2758m) et le plus
haut de Suisse (Umbrailpass 2503m), cette étape reste la plus haute de ce
voyage. Avec ces 4400m de dénivellation
positive, totalisant 68km d’ascencion, elle possède également le profil le plus
difficile. Avec son gel matinal (-1°C
au départ du camping Morteratsch, -5°C
à l’aube..) elle est aussi la plus fraîche.
Le passage
au Stelvio marque la fin de la première partie de ce voyage à travers les Alpes
Suisse et une arrivée haute en couleurs en Italie.
La deuxième
partie me mènera du Stelvio aux Dolomites, dans l’espoir de découvrir une
multitude de paysages.
Bike for Africa pédale pour www.togotochildren.ch
Le Stelvio, c'est mon coup de coeur, alors si l'envie vous en dit de découvrir cette folle ascension à travers ma passion et ma manière de la vivre, cliquez-ici
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